Ivan : Je pars du constat que ma pensée est une réaction de ma mémoire, le fruit de mon conditionnement (celui que j'ai reçu et celui de toute l’humanité). Ce conditionnement c’est mon Moi et nous croyons dur comme fer que ce Moi c’est nous, notre Être, notre « nature ». Jamais nous ne remettons en cause ce Moi, cette autorité intérieure (ce « dieu » ?) à laquelle nous nous soumettons à chaque instant. Voilà pourquoi je dis que penser c'est croire.
Marie L : Bah !… Figure toi que dans mes exercices de prise de conscience des mouvements de mon squelette, j’ai fait l’expérience d’avoir une pensée sans langage. Mais il faut peut-être s’entendre sur ce que c’est que la pensée…
Ivan : Peut-il y avoir pensée sans langage ? Si je re-connais la pensée, c’est qu’elle est vieille, elle vient toujours après la perception du stimuli extérieur et après l'activation de la mémoire. Si je re-connais la pensée c'est qu'elle n’est plus, mais qu' elle a été ; c’est qu’elle est un savoir structuré et emmagasiné dans la mémoire (une partie d’échec déjà jouée et mémorisée). Si je re-connais la pensée, c’est que mon cerveau a les outils pour la « connaître à nouveau ». Ces outils c’est le langage, la comparaison, la mesure, le jugement… L’observateur qui dit « j’ai fait l’expérience d’une pensée sans langage » n’est autre que la pensée elle-même structurée par le langage. Le connu ne peut connaître. Le connu ne peut que re-connaître. Le connu re-connait le connu. Le connu (le limité, le fini) ne peut connaître l’inconnu (l’illimité, l’infini). Seule la perception affranchie de la pensée, l'attention totale donc, peut entrer en contact avec l’inconnu.