Rue Vauvenargues :
A l'arrêt du bus une femme en niqab lit un roman intitulé "Ma soeur". Est-elle membre des frères musulmans ? Une jeune fille passe devant elle avec un T shirt moulant couvert de motifs de lunettes de soleil à paillettes. La paire qui est juste au niveau de ses seins est ultra déformé en un masque effaré aux pupilles en relief.
Rue Riquet :
Ces mamies qui portent des robes/blouses à fleurs, en pur nylon, encore en 2013, comme ma grand-mère en 1970.
Rue Curial :
Au 104, deux rappeurs sont filmés pour un clip. On a droit aux doigts en flingues, aux poignets cassés qui brassent de l'air, aux hochements de tête entendus, bref à toute la panoplie du genre. Ha! le refrain est tout en révolte : "J'voudrais changer mon rap".
Boulevard Barbès :
Hé hé, ici on peut acheter un "grec algérien sous contrôle AVS" disent les immenses lettres vertes sur fond noir. Devant la vitrine vidée par le ramadan, trois vieux blacks chemises-cravates parlent très fort au milieu du trottoir en se grattant tous les trois le crâne en miroir. Des millions de gens, des millions de vie, des millions d'histoires. Impensable de toutes les raconter. Ça donne le tournis. Pourtant en attraper quelques unes.
Rue Vauvenargues :
L'ombre du grand cèdre que personne ne voit, projetée sur le pignon aveugle et l'homme au short bleu qui fait systématiquement pisser son caniche sur les enjoliveurs des voitures en stationnement.
Rue Championnet :
Un couple en chaleur et leur bébé qui cuit en plein cagnard dans sa poussette.
Rue Vauvenargues (plus haut) :
Une jeune femme qui réfléchit intensément devant le menu d'un bistro fermé. L'attache de son soutien-gorge lui déforme le dos. Y-a-t'il un homme dans sa vie pour le lui dire ?
Partout les volets sont tirés en prévision de la canicule.
On envoie des figurants à ma rencontre : un couple d'obèses qui se dandinent comme des femmes enceintes, un couple de lesbiennes à têtes rasées, un jeune père à crête et chaussures vernies rouges qui téléphone d'une main et poussette son gamin de l'autre, un rom en vélo qui tire son caddy plein de ferrailles (50€ la tonne), une princesse en short moulant moulant dont les parures bruyantes font se retourner le quartier, un cuistot paki qui mate une smart sport avec avidité pendant sa pause.
Rue Damrémont :
Le pétard de cette blonde emplit tout mon champ de vision. Son étroit futal en peau de python est prêt à exploser. Elle louvoie vers une épicerie pour acheter des brugnons.
Rue Caulaincourt :
Une petite brune terriblement dénudée enfourche un Vespa orange... Pas la peine d'aller voir un film italien ce soir au Cinéma des Cinéastes ou au Studio 28 : la chaleur et le cinéma sont dans la rue.
Chroniques d'un petit pays : en déroulant les rues
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