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Ivan : Une question Walter, le pédagogue peut-il transmettre ce qu'il a
compris (il ne s'agit pas de transmettre du savoir ici), sans volonté, sans émotion, sans intensité ?
Walter : Etre attentif. C’est "L'attention totale" pratiquée par Jiddu
Krishnamurti (pédagogue 1895-1986). Est-ce que je peux percevoir que mon énergie fuit en vain dans la parole, le désir
de convaincre, la peur, la colère, l'identification, la résistance ? Dans cet état de perception, les réactions émotionnelles et les pensées qu’elles ne manquent pas de générer se dissolvent, libérant l’énergie qu’elles emprisonnaient. Cela n’a rien d’une attitude philosophique ou
intellectuelle, c’est une vraie perception, totale, qui mobilise toute l’énergie disponible et en génère d’autant
plus. Cette énergie, c’est la Vie.
Ivan : Et le savoir ? Faut-il ne s'attacher à aucun savoir ?
Walter : Fondamentalement oui. Il faut avant tout être traversé par sa
pratique, n'avoir aucun désir de transmettre, et n'en transmettre que mieux... Laisser la transmission se faire par
rayonnement, imprégnation, induction, en dehors du langage verbal, en fait en dehors du savoir. En bref rayonner son « savoir faire » plutôt que transmettre son savoir. Et il me semble que la liberté est fondamentale pour réellement transmettre « en profondeur », or celui qui est libre est
celui qui a d'abord réalisé qu’il ne « possède » pas ce qu’il a à transmettre, il n'a donc pas peur de transmettre.
Une fois le savoir-faire transmis, on peut se poser la question de la transmission du savoir, de la théorie. Le savoir
ne sert réellement que celui qui à le savoir faire.
Ivan : Chaque habitude est un aspect mort de nous-même. Le neurologue
Lionel Nakache constate que, dans l'habitude, les liaisons neuronales se rigidifient et cassent,
alors que dans une attitude de changement de vie ou de méditation, de nouvelles liaisons se créent.
Walter : Très intéressant. Toujours remettre en mouvement le corps, la
perception. La parabole de "L'oie de Konrad Lorenz" (biologiste/zoologiste/psychiatre, père de l’éthologie globale
1903-1989) nous montre que l'habitude, si elle permet la réalisation automatique de comportements, entraîne également un stress profond si elle n’est pas suivie. Par exemple, faire son Qi Gong tous les soirs à 19h peut (et souvent devient) une habitude. Double inconvénient : le soir où
l’on ne peut pas faire son Qi Gong, on se retrouve en situation de stress diffuse (dommage pour les proches !) et
surtout l’habitude de faire son Qi Gong, par définition, fait que l’on pratique sans attention, sans vigilance, de
façon automatique, et donc au final, on ne fait que perdre son temps. Transmettre, c’est donc aussi ne pas laisser ce genre d’habitudes s’installer trop longuement. Une certaine pédagogie, souvent utilisée par les Maîtres que j’ai pu rencontrer, consiste à laisser les gens
s’habituer, et à se servir du choc fournit par la rupture de l’habitude pour libérer l’énergie qui était emprisonnée…
Car l’habitude emprisonne l’énergie et la vie, elle fait stagner la vitalité.
Ivan : Il faut donc être fluide.
Walter : Oui, fluide, vivant. Je peux errer longtemps dans une pièce
noire à la recherche de l’interrupteur. Quand je le trouve, la lumière est instantanée. Mais pour le
trouver, il faut bouger, toucher les murs, marcher, être vivant, en mouvement !!! Chaque instant est une nouvelle pièce noire
à éclairer.
Ivan : On sent que tout est éclairé chez Krishnamurti. Il rayonne comme
l'arbre, sans désir de trandsformer.
Walter : Krishnamurti est un être exceptionnel. Un vecteur ne possédant
rien et nourrit, habillé, transporté par ses amis, et toujours dans la relation, toujours dans
l'échange.
Ivan : Un révolutionnaire, un anarchiste...
Walter : Un humain affranchit de toute autorité (intérieure ou
extérieure), de la morale, de la religion, des croyances organisées, des frontières, des nationalismes, des
partis politiques, des idéaux, tout en étant la personne la plus éthique au monde ! Hélas, il a fini sa vie sur un constat
d'échec. Aucun de se élèves n'était traversé par cette perception totale, cette vision pénétrante. Lui pensait qu'il
suffisait de 4 ou 5 personnes dans cet état de conscience pour amener un changement psychologique
radical en l'homme...