Cher Khaled,
je tiens à te féliciter pour ton courage à t'engager dans cette belle aventure,
et, si je puis me permettre, j'aimerais te dire quelques mots.
Nous sommes tous secrétaires d'état !
Que nous soyons en Tunisie, en Égypte, en Algérie, au Maroc ou en France, nous n'acceptons d'être gouverné que si nous pouvons gouverner à notre tour.
Nous sommes donc, potentiellement, chacun d'entre nous dans la rue, en droit et en devoir de devenir juré d'assise, élu
municipal, député, secrétaire d'état, ministre, président.
Les situations conflictuelles que tu vas rencontrer au quotidien, cher Khaled, dépassent toutes les frontières,
aussi pouvons-nous chacun, par notre attention (et non par notre opinion ou notre jugement) t'aider à les
dissoudre.
Pour voir le neuf (le mouvement du réel), il faut voir le monde dans sa globalité (sans focaliser sur un point),
sans divisions et sans frontières.
Les frontières géographiques, politiques, religieuses, sociales, générationnelles sont des inventions humaines construites sur des peurs.
Le cerveau humain est une belle mécanique réactionnaire (la pensée est une réaction aux stimulis du réel) qui cloisonne tout
pour nous protéger de nos peurs.
Oui le cerveau humain s'accroche au connu (le passé) car il a peur du réel, peur du présent qui est toujours neuf, peur du
vide, peur de la mort (en fait il a peur de perdre le connu. Il ne peut par définition connaitre l'inconnu ;)
La conscience sera toujours limitée à son propre contenu, alors que le présent est infini.
Seuls les gens attentifs, à l'écoute, respectueux, humbles, sans attentes, sans idéaux et ne désirant pas le pouvoir peuvent
t'aider à bien gouverner, toi et tes collègues :
- Les étudiants qui ont soif de comprendre.
- Les jeunes qui vivent intensément le présent.
- les femmes qui ont une perception fine des relations humaines et du désir masculin.
- les artistes qui sont dans la pensée/action, toujours prêts à décaper les rapports humains.
- Les paysans qui sont encore au contact de la météo, de la terre et des saisons.
- Les vieilles et vieux sages qui sont attentifs aux monde et rayonnent par leur comportement.
- Enfin, tous ceux qui décrètent leur liberté, ici et maintenant, avec responsabilité et amour.
L'attention, l'écoute sont les meilleurs outils d'un secrétaire d'état (la compréhension et l'action vraie en
découlent).
Le jugement, l'opinion, le rejet, la résistance, la soumission, l'identification, les idéaux, la colère, la revanche,
sont ses pires outils.
Ton unique soucis il me semble : rester en contact fluide avec le mouvement du réel qui est à voir et à comprendre comme un
surgissement permanent (à la fois mort et naissance).
Aussi, Khaled, je me permets de te suggérer d'ouvrir un blog sur lequel tu nous soumettrais A TOUS, AU QUOTIDIEN, les
éléments des situations concrètes (techniques ou psychologiques) et conflictuelles qui se posent à toi ?
Mutualiser les écoutes et les regards sur une situation permet de se découvrir et
de découvrir la voie que l'on ne pouvait même pas imaginer.
Le monde est un village
La représentation n'est pas un pouvoir
tu es celui qui ne sait pas plutôt que celui qui sait
tu n'es pas seul
art-micalement
Ivan Sigg
(peintre et écrivain)