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Blog d'Ivan Sigg

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Carnet quotidien d'un Artiste Peintre Romancier,performeur en peinture digitale animée, consultant en innovation et créativité


Le vieil homme fait une péroraison pour le nouveau Mozart (Chapitre 42)

Publié par Ivan Sigg sur 2 Mai 2016, 14:54pm

Catégories : #Dialogues, #Théâtre

Le vieil homme fait une péroraison pour le nouveau Mozart (Chapitre 42)

Chaque semaine je vais dialoguer avec le vieil homme. Je partage ces échanges avec vous, chers lectrices et lecteurs, car je les trouve savoureux et d'une grande richesse.

Moi : comment allez-vous ?

Vieil homme : pas fort. Les neurones frappent contre la paroi crânienne pour s'échapper et je crains réellement qu'une partie n'ait déjà réussi.

Moi : ha ha ha

Vieil homme : alors cette Transatlantique ?

Moi : formidable ! Voici le carnet de voyage que j'ai réalisé pendant la traversée

Vieil homme : ça fait peur !

Moi : peur de quoi ?

Vieil homme : ça fait peur, car vous déballez avec une incroyable aisance une telle quantité de techniques extrêmement personnelles d'artiste polymorphe, que ça en parait incroyable, et presque effrayant... Vous êtes d'accord avec moi ?

Moi : votre vision m'interpelle...

Vieil homme : au fait, j'ai écrit un texte...

Moi : lisez-le moi, je vous écoute.

Vieil homme : je l'ai écrit dans ma tête pendant mes longues périodes d'oisiveté. C'est une sorte de lettre d'introduction pour lancer la carrière de votre fils. Sans nous voir beaucoup, les relations avec ce musicien d'exception se sont bien enrichies. Entre nous, son père est un bel homme dont je me sens proche et avec qui je dialogue régulièrement.

Moi : vous parlez de moi ?

Vieil homme : si vous voulez, je n'ai pas d'avis sur la question. Ce musicien donc, me fait part régulièrement de ses productions et inventions. Il était étudiant comme moi à Alger. Il se dirigeait vers l'aéronautique quand moi j'avais choisi la médecine. Stages en aéroclubs, vols sur simulateurs, cours sur les forces physiques, la propulsion et la météo... Un jour, dans la forêt de Fontainebleau, nous sommes tombés ma femme et moi sur un vieux biplan transformé en restaurant à deux étages. J'en ai fait part à votre fils qui m'a aussitôt donné le type de l'appareil, sa date de fabrication et son numéro d'immatriculation !

Moi : incroyable !

Vieil homme : attendez, j'ai mieux. Il m'a révélé que pendant ses examens auditifs on avait découvert qu'il avait des dispositions auriculaires extraordinaires : en fait c'était un génie de l'othorino-laryngologie ! Tout cela a été confirmé dans son conservatoire de musique. On a même créé un nouveau conservatoire régional pour lui !

Moi : disons qu'une section de musiques actuelles assistées par ordinateur venait de s'ouvrir...

Vieil homme : vous voyez ! Alors il a très vite élargi son audience, créé un mouvement autour de lui dont on vous donnera les références si vous en faites la demande. De grandes salles l'ont accueilli dans le quartier. Sa mère, une femme très travailleuse, s'est aperçue qu'au début il avait une position d'exécutant et que finalement, par déplacement, il était devenu compositeur. Sa position en musique électronique a été confirmée par ses professeurs. Prenons un air d'opėrette par exemple. Il va nous donner un thème comme "C'est l'amour" dans "La fille de Madame Angot", et aussitôt des "Ah!" et un "Oui" général monte de l'assistance. D'habitude ça donne un ta ta ta ta ta ta vous voyez ? Avec lui ça donne directement un TA TA TA TA TA TA puissant.

Moi : ha ha ha

Vieil homme : ça vous fait rire, comme le public... Cette musique est décevante voire même choquante pour le béotien, mais je vais vous l'expliquer. Vous souvenez-vous quand vous avez entendu Debussy pour la première fois ?

Moi : non

Vieil homme : moi je m'en souviens ! Ah, écouter "Prologue à l'ami des femmes"...

Moi : voulez-vous dire "prélude à l'après-midi d'un faune" d'après un texte de Mallarmé?

Vieil homme : c'est ce que j'ai dit. C'était inouï ! Incompréhensible pour nous. Une scène était même jouée, prétendant que c'était celle qui avait inspiré Debussy ! Ensuite il y a eut Satie, Ravel, Milhaud, Poulenc, Messiaen, Dutilleux... et ainsi de suite jusqu'à votre fils. Pour mon centenaire, dans six ans, vous verrez que je peux être très utile. Voici mon explication : il y a 250 ans, le jeune Mozart fait une conférence à Paris en public avec son père. Les gens qui l'entendent ce jour-là ne se doutent pas qu'ils ont à faire à un génie. 250 ans ont passé, ils savent que c'est un génie et ils sont contents de l'avoir côtoyé. À son tour votre fils va devenir un génie, mais personne encore ne le sait.

Moi : ha ha ha

Vieil homme : vous riez, mais tout ça vient dans ma tête très simplement, sans aucun effort. Écoutez-moi attentivement : dans cent ans, c'est à dire ce soir, votre fils sera devenu un génie officiel de la musique électronique ! Voilà, c'est l'introduction que je me propose de faire oralement devant un auditoire réceptif. C'est concis, non ?

Moi : il n'y a rien a enlever.

Vieil homme : la grande question, vous allez me dire, c'est ce qui va se passer dans l'enceinte du théâtre du Château de Versailles.

Moi : ah !?

Vieil homme : le plan théorique est le suivant : il faut donner à ce jeune musicien le choix du jour et de l'heure. Fixons 16h. L'impétrant doit arriver une heure avant le concert pour être présenté aux organisateurs puis il doit gagner prestement la salle du château tout proche et là, on le laisse à son affaire. Il y a une jauge de 50 places, mais l'association compte 400 membres. Laissons faire Tony le grand organisateur et Mister O le financier. Ça me donnera l'occasion de parler en public. Ça va marcher, j'en suis persuadé. Vous serez son accompagnateur idéal, je sais qu'on peut compter sur vous.

Moi : parfait. Même mon rôle est prévu :)

Vieil homme : Dans les dessins de votre carnet de voyage, on ne peut pas vous reprocher toutes vos démonstrations de virtuosité... Cependant, toutes ces images n'ont qu'un rapport très indirect avec la Transatlantique, ou disons qu'elles sont moins réalistes ou figuratives que d'habitude. Il y a par exemple, moins de paysages et de croquis sur le vif...

Moi : très juste. En fait nous avons fait beaucoup moins d'escales et d'excursions.

Vieil homme : et maintenant arrive l'instant fatidique où le vieux a envie de pisser... Ce qui, je vois, ne soulève chez vous aucun enthousiasme, alors que vous avez acquis une certaine compétence en ce domaine, non ? Surtout dans le baisser de pantalon, ha ha ha.

Moi : ne la sortez pas tout de suite s'il vous plait, approchez-vous et asseyez-vous avant de commencer.

Vieil homme : non, dans le lavabo, c'est plus pratique.

Moi : hé non ! C'est le mur là, regardez, il n'y a pas de lavabo !

Vieil homme : tant pis !

Moi : pétard, c'est pas vrai, il y en a partout !

Vieil homme : votre efficacité m'impressionne toujours. Vous avez essuyé tout ça en un tour de main . Dites, pour votre fils, c'était une belle péroraison, hein ? Dans 100 ans vous vous souviendrez du plaisir que vous aviez à écouter ce soir ce génie méconnu, car rappelez-vous, le concert a lieu ce soir au château de Versailles ! Vous avez tout pour vous 1) ma voiture 2) votre extraordinaire talent de conducteur 3) un plan pour ne pas nous égarer dans les buissons des jardins de Versailles. À mon avis ça vaut la peine. Souvent ce genre d'évènement capote car tout est fait trop vite...

Moi : oui mais nous avons les pieds sur terre tous les deux.

Vieil homme : à ce propos, un grand noir athlétique à la plastique formidable est venu s'occuper de mes petits pieds blancs. Il imprimait d'étranges tremblements à mes métatarses, c'était formidable. Vous connaissez cette science ?

Moi : pas du tout.

Vieil homme : entre nous, heureusement que nous avons lâché l'affaire des chevaux en papier, ça avait pris trop d'ampleur. Nous errions entre rêve et réalité, comme vous l'aviez suggéré. Pourtant là aussi, la musique avait une part importante vous vous rappelez ? Les notes de chaque cor de chasse surgissait dans le cor du voisin, audace que personne à ma connaissance n'avait tentée auparavant. Je m'étais fait faire une tenue de soirée pour cette occasion, mais je refuse de faire des compétitions d'élégances. Ce survêtement à élastique variable fera très bien l'affaire. On m'avait donné le statut honorifique de témoin de moralité sur l'affaire... Dites, je crois que mes neurones tricotent...?

Moi : hé hé, oui on peut le dire, ils tricotent, mais avec beaucoup de créativité, ce qui n'est pas bien grave pour vous et plutôt plaisant pour l'auditeur.

Vieil homme : vous avez toujours le mot juste au bon moment.

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