Vieil homme : à qui avons nous affaire ?
Moi : mais c'est moi !
Vieil homme : vous !? Ça alors ! Vous venez d'effectuer ce que j'appelle "une arrivée à la cosaque".
Moi : ce qui expliquerait les origines russes que je n'ai pas.
Vieil homme : figurez-vous que je traine souvent à l'Eglise russe ces temps-ci et il se passe des choses insolites là-bas.
Moi : non !?
Vieil homme : c'est un endroit bien connu, avec son enfilade de chapelles. Je m'approche donc de l'une de ces chapelles où se trouve déjà du monde. Le prêtre me dit "Vous venez pourquoi ?" — à l'occasion de la fête et pour soulager des besoins naturels. — Pipi ou caca ? me fait-il. — Pipi, réponds-je sans hésiter. Il m'attrape alors les épaules à deux mains et, de sa poigne orthodoxe, m'extrait d'un coup par le haut, de ma veste, de ma chemise et de mon pantalon, me laissant la bannière au vent. Insolite non ?
Moi : plutôt.
Vieil homme : je me trouvais littéralement à poil dans une église orthodoxe, le machin au garde à vous. Il m'amène alors un bidon de bois et je me vide de mes eaux.
Moi : sous ses yeux concu... pissants ?
Vieil homme : par décence, l'homme de foi s'est voilé la face, pas la fesse !, pour me laisser mixer en paix, ha ha.
Moi : un saint homme.
Vieil homme : il y avait quelque chose de russe dans tout ça et pourtant peu orthodoxe si on y réfléchit. C'est la première fois de ma vie que j'étais confronté à une telle pratique urologique !
Moi : pour moi c'est la deuxième fois car c'est la deuxième version de ce fantasme que vous me servez !
Vieil homme : allons ! Vous plaisantez ?
Moi : si je vous le dit. La dernière fois il s'agissait d'une religieuse dans une minuscule cellule, qui vous suspendait par le col, vous dénudait et vous présentait "la caisse à pipi"...
Vieil homme : vous faites bien de me le rappeler. En tous cas, cette nouvelle version est plus virile que la précédente et moins que la prochaine, non ? ...Il y a tout de suite de l'animation dans cette chambre quand vous y êtes, nom d'un chien !
Moi : hé bien, puisque vous êtes animé, sortons marcher si vous êtes d'accord.
Vieil homme : oui c'est une bonne idée, mais établissons un plan de campagne d'abord. Les choses se passent mieux si on les explicite dans leurs détails. Il faut toujours expliciter.
Moi : soit, je vous écoute.
Vieil homme : nous allons sortir sur la droite de ce soit disant hôtel ou hôpital, appelez-le comme vous voulez. Nous lirons le panneau "attention fermeture automatique de la porte". Puis nous entrerons dans le square des Chamaillards. Un endroit charmant que j'apprécie. Nous tournerons à droite dans la rue d'un peintre provocateur... ?
Moi : la rue Marcel Duchamp ?
Vieil homme : exactement, la rue du fossoyeur de l'art...
Moi : ha ha
Vieil homme : Nous descendrons cette rue pleine d'ateliers en briques et d'artistes. Nous passerons au pied d'un immeuble en béton devant deux boulets de canons Puis nous tournerons dans la rue... ?
Moi : dans la rue Nationale quen ous remonterons jusqu'au petit italien qui vous servira votre tiramisu et votre coca désormais incontournables.
Vieil homme : hé oui, j'aime ça. Enfin nous remonterons par la rue du médailliste Ponscarme et nous serons revenus chez nous. Ça me semble parfait.
Moi : vous êtes extraordinaire de clarté et de précision aujourd'hui ! Allons-y.
EN MARCHANT
Vieil homme : les passants doivent se dire "tiens encore ce vieux PD et son mignon qui se promènent main dans la main"
Moi : c'est pénible ces réflexions. Les gens se disent "tiens voilà un vieux père et son fils"...son beau-fils en l'occurence.
Vieil homme : vous avez raison, je remballe mes PD pour une autre situation. L'autre jour, à la télévision, il y avait mon père dans un film. L'acteur qui le jouait était très bien. Je dois dire que j'ai plus de chance avec vous qu'avec mon père. Il était dur.
Moi : et moi itou.
À L'ITALIEN
Vieil homme : j'aime bien cet endroit, il est apaisant et la patronne et sa fille sont sympathiques.
Moi : je suis heureux que cela vous plaise.
Vieil homme : hier, dans la nuit, j'ai fait un rêve. J'étais dans une salle pleine de têtes d'hommes déplumées. L'un d'eux m'a frappé...
Moi : un homme vous a frappé ?
Vieil homme : non, l'un des crânes déplumé.
Moi : un crâne vous a tapé sur la tête ?
Vieil homme : ne faites pas l'âne ! Je reprends : j'ai été marqué par un crâne lustré sur lequel il y avait un reflet lumineux. Une tache de lumière juste sur le dessus du crâne, vous voyez ?
Moi : ça y est, je vous suis.
Vieil homme : alors par soucis d'équilibre je regarde son voisin, chauve et astiqué lui aussi, et oh ! Incroyable ! Il y avait un carré d'Albuplast à la place du reflet lumineux ! Nous avons alors un petit échange verbal et il me révèle son problème.
Moi : alors ? Une chutte ? Une bagarre ?
Vieil homme : Non, ll'homme au pansement ne supportait pas son reflet de crâne et le cachait sous ce pansement si voyant ! Résultat des courses, cela lui tirait les traits comme s'il s'escrimait à pousser pour faire caca. Si l'Albuplast avait été déposé par une mouche, cela aurait franchement été intéressant ! Je n'ose imaginer si ce pansement avait été collé par un prêtre orthodoxe...ha ha ha
Moi : ha ha
Vieil homme : entre nous, j'ai l'impression que ma femme fait partie du public. J'ai tenté de renouer le dialogue avec elle mais il n'y a rien eu à faire. Oh ! Quelque chose me travaille... quelque chose de non crochu...Plutôt de l'ordre de la caresse... Disons que ça chemine...
Moi : de quoi parlez vous ?
Vieil homme : de la caca ! Il va falloir que je me lève et que nous allions aux toilettes la libérer.
Moi :...! maintenant.
Vieil homme : c'est une éventualité qui se confirme car j'ai le colon qui s'énerve... À propos de colon, vous savez, en 39, mon père s'est levé pour mettre son képi d'adjudant afin de se présenter au rassemblement de conscription. Mais bon, mon père n'a rien fait. Il ne s'est rien passé en Algérie pendant la deuxième guerre mondiale.
Moi : Comment ça !? Il ne s'est rien passé entre 1939 et 1945 !??
Vieil homme : en 42 et 43 il y a eu quelques bombardements allemands sur Alger et Oran mais la DCA était prompte à répliquer. La Luftwaffe décollait de Tunisie et de Lybie.
Moi : que disait votre père à la maison ?
Vieil homme : Alger était Pétainiste. On était à droite. On était Pétainiste. Il y avait un portrait de Pétain dans le salon.
Moi : vous avez eu votre BAC en 37. Vous aviez 18 ans en 39. Vous pensiez quoi de la guerre ? C'était quoi vos discussions avec vos camarades de la Fac de médecine ?
Vieil homme : j'ai été convoqué à une visite médicale d'incorporation. J'avais attrapé la tuberculose à 16 ans alors j'ai montré la radio de ma lésion pulmonaire et ils m'ont jeté dehors ! "Pas question d'introduire un tuberculeux dans une caserne !"
Moi : et vos copains de lycée qui étaient juifs ?
Vieil homme : les profs et les élèves juifs ont quitté les collèges et les lycées et ont dû créer des écoles à domicile. À la Fac d'Alger on avait remis des retraités au travail. Il y avait des organisations politiques balbutiantes à la Fac. Certains élèves se mobilisaient contre Pétain. L'assassinat de Darlan, le chef de la Marine de Pétain, en 42, a été un fait marquant. Il était là par hasard car son fils avait une appendicite. L'auteur, un étudiant a été exécuté. Je crois que la résistance était dérisoire. On allait dans le maquis comme on allait à la chasse. Je ne me rappelle plus si on a vu des allemands dans Alger. Je me souviens d'une famille juive qui s'est fait remarquer en 44 pour faits de résistance. Et puis les profs Pétainistes ont été vidé de la Fac en 1945.
Moi : et que pensaient vos parents de tout ça ?
Vieil homme : je me rappelle de ma mère qui sanglote le 8 mai 45... C'était un évènement le discours de De Gaulle. il avait de l'impact. Hėlas c'est ce même homme qui a lancé plus tard le "je vous ai compris" que je n'ai jamais digéré.
L'ALGÉRIE ENTRE 1939 ET 1945
1939
- Camps d'internements de républicains espagnols
1940
- Camps d'internements pour communistes, independantistes musulmans et refugiés espagnols, combattants des brigades internationales et juifs étrangers
Le Général Noguès fait censurer l'appel du Général de Gaulle
Jean Achiary (commissaire de police) crée un groupe de résistants
- Les juifs d'algérie sont privés de leur nationalité française
- Du fait de cette loi 5% des enseignants perdent leur statut
- Les fonctionnaires francs-maçons perdent leurs emplois
- De 40 à 42 la propagande Vichyste et la collaboration se développe
1941
- répression de l'activité communiste et anarchiste
- organisation de la résistance: Jean l'Hostis (ingénieur);(!, Roger Carcassonne (chef d'entreprise), Henri d'Astier de la Vigerie (officier monarchiste )et José Aboulker étudiant en médecine qui recrute dans les milieux universitaires.
1942
- Procès de 61 communistes clandestins et condamnations à mort
- Des dizaines de milliers de travailleurs musulmans pauvres de Kabylie sont envoyés travailler en Allemagne
- Opération Torch : 23 octobre 42. José Aboulker et 400 résistants au 2/3 juifs paralysent tous les points stratégiques d'Alger et arrêtent le Général Juin et l'amiral Darlan (chef de la marine francaise qui collabore avec les nazis), ce qui permet la réussite du débarquement allié le 8 novembre.
- Darlan se rallie mollement aux alliés et reste au pouvoir sans toucher aux lois vichystes !
20 décembre 42 assassinat de Darlan par un jeune étudiant, commandité par le monarchiste Henri d'Astier de la Vigerie qui soutient De Gaulle et veut mettre au pouvoir le Compte de Paris présent à Alger (+ soutien des services secrets britanniques)
- Giraud et Peyrouton sont mis en place mais n'abrogent pas les lois Vichystes
1943
- L'arrivée de Jean Monnet, envoyé par Roosevelt, va permettre un très lent rétablissement de la démocratie.
1944
- 30 janvier au 8 février conférence de Brazzaville. Degaulle s'oppose à l'émancipztion, à l'autonomie des peuples et à la sortie de l'algérie de l'empire français.
1945
- 8 mai : les manifestations de la victoire sur le nazisme se transforment en manifestations indépendantistes et anticolonialistes. Un policier tue un jeune portant le drapeau algérien ce qui déclenche les massacres de Sétif, Guelma et Kherrata du 8 mai au 22 mai 45 (10000 à 40000 morts algériens. 102 morts européens)
(Sources Wikipédia)