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Blog d'Ivan Sigg

Blog d'Ivan Sigg

Carnet quotidien d'un Artiste Peintre Romancier,performeur en peinture digitale animée, consultant en innovation et créativité


Mohamed Bouazizi et Louise Michel

Publié par Ivan Sigg sur 24 Janvier 2011, 12:52pm

Catégories : #Politique

Mohamed Bouazizi (26 ans) voulait-il obtenir quelque chose en s'immolant ?

 

Il me semble que ce jeune étudiant s'est offert comme une étincelle qui a mis le feu aux poudres de la révolution. Mohamed n'a rien pris, il a mis fin à sa souffrance par le feu (il vendait des légumes pour survivre, la police a interdit ces ventes). Il a dit STOP au gâchis de sa vie en l'abrégeant; et cette fin rayonne en direction de tous. Elle nous éclaire, là-bas en Tunisie et ici en France.

Je vois ce signal comme une métaphore de la révolution : c'est l'acte sans jugement que je produis ici et maintenant — flamme sans fumée — qui  en m'affranchissant du temps (passé et futur) me remet en contact avec le présent. La révolution est une explosion/création née de l'attention à soi-même et au monde. C'est pourquoi il ne faut surtout pas nous immoler physiquement, mais mourir à nous-même, psychologiquement, à chaque instant.

 

Depuis deux ans, chaque vendredi, je peux lire cette phrase sur le mur du Square Carpeaux dans le XVIIIème arrondissement de Paris : " Le peuple n'obtient que ce qu'il prend ". Cette phrase est inscrite dans une bulle de papier collée à côté d'un immense portrait peint d'une héroïne de la commune de Paris, l'anarchiste Louise Michel (1830 - 1905). Et chaque vendredi cette phrase, devenue familère, me fait tiquer, mais jusque là, je n'arrivais pas à comprendre pourquoi. Les actes et les paroles des jeunes Tunisiens, ces jours-ci, m'ont enfin ouvert les yeux sur cette phrase. Merci à Mohamed et à eux.

 

Toi, moi et les autres nous sommes le peuple, le monde. Que voulons obtenir : La liberté ? La fin des souffrances ? un toit ? à manger ? du travail ? un meilleur salaire ?  la satisfaction de nos revendications ? le pouvoir de décider? des loisirs ? être heureux ? le pouvoir de consommer ? une voiture ?... Obtenir ?

Mais la liberté n'est pas une fin qui s'obtient ou se prend, elle est un état qui se vit ici et maintenant, quel que soit le contexte.

Et pour le reste, avons nous des buts communs ? qui décidera que ton but  (ton idée, ton besoin) est meilleur que le mien ? Et notre but — si nous arrivons à nous entendre — justifiera les moyens comme dans toutes les révolutions passées ?


Les buts et les idéaux ne sont ils pas une projection de la pensée ?

L'action en vue d'un but prédéterminé n'est pas l'action mais la conformité à une croyance, une idée, une méthode établie par d'autres. Les buts et les idéaux sont toujours issus de l'expérience, du savoir, de la mémoire (le connu) , jamais de l'instant présent (l'inconnu).

Peut-on faire une révolution avec le passé ? Le passé  (le connu) ne peut entrer en contact avec le neuf qui surgit (le présent, l'inconnu)

 

Alors obtenir en prenant quoi et à qui ?

Prendre les maisons du dictateur (et de sa clique) OU  créer en les transformant en crèches et centres culturels de proximité ?


Obtenir ou donner ? Obtenir ou créer ? Obtenir ou comprendre sans juger ?

Prendre ou donner ? Prendre ou créer ? Prendre ou comprendre sans juger ?


Prendre les rennes parce que "nous savons, nous avons l'expérience" OU dire que "nous ne savons pas" et écouter TOUTES les voix qui s'expriment ?

Prendre le sommet du pouvoir OU créer de nouveaux modes de relation et de gestions, non verticaux, avec introduction du tirage au sort, au village, à l'entreprise et dans les grandes villes ?

Prendre les vieilles méthodes du capital basés sur l'accumulation, la consommation, la compétition et l'ambition OU partager ce qui est avec respect pour la terre, les humains et les animaux.

Prendre les directives du FMI, de l'OMC et de la Banque Mondiale pour argent comptant OU mutualiser toutes les compétences du maghreb ?

Prendre les vieux dirigeants corrompus (ou détachés de la réalité) OU faire du neuf chaque jour en écoutant totalement les aspirations des étudiants, des femmes, des hommes, des pédagogues, des paysans et des ouvriers... ?

Prendre le chemin de la non-démocratie bi-partiste OU abattre les frontières idéologiques ?

 

Autant de questions auxquelles je vous propose d'apporter votre regard...

 

Commentaire 1 posté par Habib :
Je suis en ligne avec toi Ivan, surtout pour faire du palais de Carthage un jardin pour les petits et les grands. Je vis et respire l'euphorie Tunisienne à pleins poumons et je lutte de toutes mes forces contre le pessimisme, le pragmatisme, les leçons de l'histoire et tout ce qui m’empêche de rêver à tous ces possibles....alors voilà ne sachant dire ce que demain sera...j'ai dans la tête une pensée tendre pour Mohamed et Louise.

 

un commentaire vient d'être posté par Didier Gosselin sur l'article Mohamed Bouazizi (26 ans) et Louise Michel, sur votre blog Blog d'Ivan Sigg

Commentaire 2 posté par Didier Gosselin :
Trouvé dans le dernier Monde diplomatique (janvier 2011) un extrait d'un article de Evelyne Pieiller consacré au philosophe Alain Badiou.
"Badiou sauve malgré tout cette pauvre "espèce animale qui tente de surmonter son animalité" (nous en l'occurence) en lui accordant l'aptitude à la transcendance, c'est à dire la capacité de subordonner les nécessités égoïstes à des principes, vérités qui valent pour tous. C'est d'ailleurs là le fondement même de la démocratie, qui postule que tout homme est doté de raison, à charge pour la société, notamment par l'enseignement, de lui donner les moyens d'apprendre à en user, afin de s'émanciper de la confusion des pulsions et autres fauteurs d'opinion. Mais, pour Badiou, la sortie de la caverne de l'égo n'est ni progressive, ni programmable. Elle a lieu dans le choc d'une rencontre avec ce qu'il nomme "l'évènement". Un acte, historique, artistique, amoureux, soudain fait "apparaître une possibilité invisible ou même impensable", en déchirant le consensus de la valeur souveraine attribuée à ce qui singularise l'individu plutôt qu'a ce qu'il a d'universel. Ce dévoilement subi permet de s'arracher "à la finitude animale des identités", de saluer enfin l'égalité fondamentale des humains : d'entrer dans la transcendance."

Il me semble que Habib est entré en transcendance... et nous avec peut-être...!
à bientôt
Didier


Commentaire 3 posté par Habib :
Si l'un d'entre vous se rend un jour en Tunisie, je vous conseille d'aller faire un tour dans ce que les Tounsis (Tunisiens) appellent le triangle KJB (Kasserine, Jendouba, Bèja), c'est de là que sont partis toutes les révoltes (Gafsa 2008, Sidi Bouzid-Kasserine 2010). Cette population réprimée depuis des siècles est tenue à l'écart de toute décision (ce sont d'anciens hérétiques qui se sont mis à l'écart dès les premières invasions). Ils parlent des Romains, des Turcs, des Français, de Bourguiba et Ben Ali dans le même espace-temps, c'est impressionnant. J'aime ces gens ! ils ne réclament rien, ni démocratie, ni argent, ni routes,... Ils sont perçus comme des extra-terrestres par le reste de la population, c'est une rencontre du 3ème type à faire loin des plages d'Hammamet et du bling-bling Carthaginois.


Commentaire 4 posté par Habib :
Deux amis Franco-Tunisiens viennent d'entrer au gouvernement...en Tunisie.Ils auraient eu beaucoup de difficulté pour être maire d'une ville moyenne en France, d'être député, de pouvoir louer un appartement...que sais je encore. La France compte plus de 300 000 cadres dont les parents viennent du Maghreb et l'on ne voit dans les médias que ceux qui font dans le spectacle ou le fait divers (barbu-racaille-footeux-comique). Il se trouve que certains ont refusé des nominations en Tunisie car ils espèrent un changement en France pour 2012,....à suivre

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