"L'appel des appels"
«Nous, professionnels du soin, du travail social, de l’éducation, de la justice, de l’information et de la culture, attirons l’attention des pouvoirs publics et de l’opinion sur les conséquences sociales désastreuses des réformes hâtivement mises en place ces derniers temps. A l’Université, à l’école, dans les services de soins et de travail social, dans les milieux de la justice, de l’information et de la culture, la souffrance sociale ne cesse de s’accroître. Elle compromet nos métiers et nos missions. Au nom d’une idéologie de "l’homme économique", le pouvoir défait et recompose nos métiers et nos missions en exposant toujours plus les professionnels et les usagers aux lois "naturelles" du marché. Cette idéologie s’est révélée catastrophique dans le milieu même des affaires dont elle est issue. Nous, professionnels du soin, du travail social, de l’éducation, de la justice, de l’information et de la culture, refusons qu’une telle idéologie mette maintenant en "faillite" le soin, le travail social, l’éducation, la justice, l’information et la culture. Nous appelons à une Coordination nationale de tous ceux qui refusent cette fatalité à se retrouver le 31 janvier 2009 à Paris.»
Pourquoi je ne le signe pas
:
Bonjour Roland Gori. Vous êtes l'initiateur de
"l'appel des appels" aussi je me permets de m'adresser à vous. Je ne peux que louer votre capacité à relier des énergies mais quelles énergies ? Vous dites dans Libé "Le temps des pétitions est
dépassé, le temps des réactions est révolu" pourtant vous retombez dans une pétition revendiquante. Vous dites aussi "il fallait transformer tous ces appels en une forme d'opposition sociale et
culturelle". Vous qui êtes psychothérapeute et psychanalyste, pensez-vous que l'opposition, la protestation, la radicalité, le refus, la revendication, ou la révolte aient jamais dissous les
conflits intérieurs et extérieurs à l'humain ? Que peut construire ce nouveau front sinon de nouvelles résistances ? Qu'est-ce qui doit changer, Sarkozy ou l'humain ? Les fonctionnements du
pouvoir ou les rapports entre humains ? Nos processus de pensée ou ce qui est ?
Pour être plus concret je prends quelques passages
de l'appel :
Par exemple, une "réforme" (de droite ou de gauche) est toujours désastreuse à plus ou moins long terme car elle ne fait que déplacer le problème sans jamais dissoudre le conflit.
"La souffrance sociale ne cesse de s'accroître" : en dix mille ans il y a eu d'énormes progrès scientifiques mais aucun progrès psychologique. Les humains souffrent toujours de la même chose sur cette planète : de la peur, de l'ignorance, du désir de devenir, du désir de posséder, de la haine de soi et de l'autre, de l'identification, de l'attachement (aux biens et aux êtres), du jugement ... qui sont des productions de notre pensée qui est mécanique (elle mesure et compare) et vieille (c'est une réaction de la mémoire). N'est-ce pas à tout cela qu'il faut être totalement attentif ? C'est donc d'une révolution psychologique dont nous avons besoin, non de réformes ou d'une autre idéologie.
"Les lois du marché" : Le marché n'est pas une entité hors de moi ! Les gens, la société, le monde, le marché, c'est moi, c'est nous ! C'est nous dans nos rapports au quotidien, c'est le rapport qu'il y a entre toi et moi. Et c'est notre processus de pensée (notre conditionnement, nos croyances) qui guide notre comportement; ce n'est jamais notre perception directe de ce qui est. Il y a toujours une image, une idée, un idéal, un espoir, entre nous et la réalité, entre toi et moi. l'unique question est comment avoir un oeil neuf à chaque instant, comment dissoudre cette image (cette étouffante accumulation de savoir psychologique) que construit mon cerveau entre moi et ce qui est ? Réveillons nous et révolutionnons notre façon de nous percevoir et de percevoir le monde.
"Cette idéologie s'est révélée catastrophique" : toutes les idéologies sont catastrophiques car ce sont des écrans que nous glissons
entre nous et ce qui est, par peur du présent qui est neuf d'instant en instant. L'idéal c'est le
temps qu'il y a entre l'ETRE et le DEVENIR or le devenir n'est qu'une projection de la pensée, une illusion donc.
Je ne dis pas qu'il ne faut rien faire, je constate que c'est tout le processus de notre pensée qui est à révolutionner. L'idéologie, le marché,
les objectifs destructeurs de Sarkozy sont des productions de notre pensée mécanique ; Cet appel, dans la mesure ouù il est ré-action et non action, ne leur donne-t-il pas force et raison. Prêt à
partager ce constat et à en reparler art-micalement.
Commentaire de
Marc (sur
l'article L'appel des appels, pourquoi je ne le signe pas)
Salut. C’est occasionnellement que je parcours ton blog, car j’évite de consacrer trop de temps aux media numériques, non par désaffection mais parce qu’on peut y dépenser sans en avoir
conscience ce qui me fait le plus défaut: le temps. Aussi est ce le plus souvent quand je reçois un de tes mails que je pars picorer ton éclectisme. Comme ce sont tes dessins qui me procurent le
plus de plaisir, c’est à eux que je consacre la majeure part de ma visite. Mais il m’arrive de lire. J’avais déjà trouvé très justes tes propos sur l’éducation, sujet sur lequel tout le monde
glose idiotement.
Et puis voilà que tu ne répondras pas à l’appel des appels. Bon allez j’ai cinq minutes, je viens de me délecter de tes trois croquis sur la soirée du CNSAD. (Putain ce que j’aimerais écrire
quelque chose digne d’être illustré ainsi), allez voyons voir pourquoi il ne signera pas. Et voilà qu’en quelques mots le mal dont souffre le monde est aussi efficacement explicité
que part un dessin.
« Les humains souffrent toujours de la même chose sur cette planète : de la peur, de l'ignorance, du désir de devenir, du désir de posséder, de la haine de soi et de l'autre, de
l'identification, de l'attachement (aux biens et aux êtres), du jugement ... qui sont des productions de notre pensée qui est mécanique (elle mesure et compare) et vieille (c'est une réaction de
la mémoire). »
Je n’avais rien lu d’aussi juste depuis longtemps ! Mais surtout d’aussi parfaitement formulé car il n’y manque rien. Chapeau bas. Espérons la guérison de l’humain prochaine.
Commentaire de Benoit (sur l'article L'appel des appels, pourquoi je ne le signe pas)
A moi de dire que je ne comprends pas !
"il n'y a eu aucun progrès psychologique" : au contraire.
L'humain n'a eu de cesse de réajuster sa position subjective au cours de l'histoire, pensez vous que nous sommes sujets aujourd'hui comme nous l'étions chez les grecs ? au moyen âge ? à
l'époque moderne ? Clairement non. La place que notre société post moderne nous a attribué est comme vous le dites : celle d'un maillon du marché (un maillon c'est d'ailleurs plus un objet qu'un
sujet!). Je crois que ce qui est important aujourd'hui, c'est de critiquer cette conception qui fait de l'humain un maillon qui rationnalise, calculant plus que raisonnant. De nombreuses réformes
actuelles ne vont pas dans le bon sens.
"Vous qui êtes psychothérapeute et psychanalyste, pensez-vous que l'opposition, la protestation, la radicalité, le refus, la revendication, ou la révolte aient jamais
dissous les conflits intérieurs et extérieurs à l'humain "
Je crois que c'est ce que vous dites la qui nous sépare : l'opposition c'est ce qui à fait de vous un individu autonome, créatif. Souvenez vous, n'avez vous jamais dit "non"
?