
Au bar du coin, un client reluque le prodigieux domaine mammaire de la patronne ainsi que son tatouage floral omoplato-claviculaire qui s’est dangereusement épanoui depuis le mois dernier.
— Qu’est-ce tu regardes ? Qu’est-ce qu’y a ? Chuis grasse, c’est ça ?
— Beuh non. Je t’aime comme t’es. T’a de beaux tatouages, c’est tout.
— Ca, ça veut dire que je suis grasse, donc, salaud ! Sinon tu répondrais non.
— Oh, tout de suite !
— Tu veux que je te dise, faut accepter ses rondeurs. Les gamines d’aujourd’hui elles pensent qu’à maigrir, c’est horrible. Ben moi, les clients regardent mes petits plis aimables et j’aime ça.
Le gars perdu, dont les yeux ne savent plus s'extraire du canyon soutifiant de la patronne, détourne brusquement la conversation pour enterrer son désir.
— Au fait, tu connais la tombe de Bécaud, toi ?
— Non pourquoi ?
— Je l’ai vu hier…Il est bien là-bas, tu sais.
— Allons, les cimetières c’est fait pour les vivants, pas pour les morts.
— Pourtant y en a qui mettent des fortunes dans leur caveau…
— C’est ce que je te dis. On laisse une trace pour ceux qui restent, POUR LES VIVANTS ! Quant t’es dans le trou avec les vers, t’en n’a plus rien à foutre de la beauté du cimetière. C’est les vivants qu’y viennent s’y promener ducon, pas les morts ! Tiens même que mon père disait « Moi quand chrai mort jveux qu’on m’crâme », hé ben ma mère l’a enterré, la garce. C’est pour elle qu’elle qu’elle a fait ça, pas pour mon vieux.
— (le client qui se consume et qui fait tout ce qu’il peut pour être gentil) Elle aurait pu le crâmer, mettre l’urne chez elle, sur la télé, ça aurait fait pareil et comme ça il aurait été tout près d’elle et ils auraient continuer à voir les infos ensemble.
— T’es vraiment grave toi. Aller, tu paye ton ardoise et tu dégages !