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Blog d'Ivan Sigg

Blog d'Ivan Sigg

Carnet quotidien d'un Artiste Peintre Romancier,performeur en peinture digitale animée, consultant en innovation et créativité


La pensée est notre unique problème

Publié par Ivan Sigg sur 10 Juin 2008, 15:00pm

Catégories : #philosophie


Cher Daniel Lescornet.
« Sous l’obligatoirement différent, il y a répétitions, récidives de pratiques mortifères » écris-tu.
Je constate volontiers avec toi, que dans ce monde il y a, à la fois « l’obligatoirement différent » et « des répétitions, des récidives de pratiques mortifères ». Appelons cela, voir le vrai.
Voir le faux dans le vrai c’est comprendre que « l’obligatoirement différent » appartient au plan du présent qui est un surgissement de la totalité de ce qui est d’instant en instant, du vivant, des cellules, des particules élémentaires. Alors que « répétitions et récidives des pratiques mortifères » appartiennent au plan de la pensée et de ses productions (idées, biens, représentations, désirs, souffrance…).
Pour faire cette différence fondamentale, nous devons déployer une attention pénétrante à l’ensemble du processus de la pensée, car notre MOI protecteur tente toujours de nous montrer la vie comme une fatalité faite de continuité et de répétitions, le « différent » étant une exception (toujours à atteindre) qui confirmerait la règle.
Si nos pratiques techniques peuvent évoluer, nos pratiques psychologiques (nos comportements relationnels, nos projections?) sont presque toujours récidivantes et mortifères parce que conditionnées par la peur, le jugement, l’acceptation, le rejet, l’identification, le désir, la résistance…

« l’obligatoirement différent » c’est le mouvement de ce qui est, neuf d’instant en instant, c’est l’inconnu, le non mesurable, l’inconditionné, le surgissement.
La pensée, elle, est de l’ordre du connu, du mesurable, de la mémoire, du conditionnement, de la répétition, de la récidive.

La vraie révolution consisterait donc à se déconnecter de ce conditionnement pour voir, et vivre enfin, le « toujours différent ».

Une expérience est une réaction de la mémoire à une provocation du réel, aussitôt transformée en savoir et enregistrée dans la mémoire. Elle est donc toujours de l’ordre du passé.
Une expérience « passée-toujours là » comme tu l'écris, est donc un double pléonasme qui dit connu-connu-connu. Au même titre, « les connaissances expérimentées » sont du connu-connu.
La pensée ne peut pas réagir en dehors de ses propres limites, en dehors de la mémoire. Il nous faut donc, dans ton labo comme dans mon atelier, dans le couple comme dans la rue,  nous détacher de la pensée et être intensément attentifs, pour qu’un changement arrive, pour qu’une mutation se produise, pour être dans l’action créatrice, pour être l’expérience et non l’expérimentateur, pour découvrir ce qui n’est pas de l’ordre de la pensée.

« Processus ayant toujours un degré d’adéquation à l’immédiat » écris-tu.
Voir le vrai dans cette affirmation, c’est constater qu’elle s’applique à un processus technique. Voir le faux dans le vrai c’est constater qu’un processus psychologique est toujours une idée projetée sur le réel, une méthode en vue d’un but, du connu plaqué sur de l’inconnu, du passé sur du présent, et n’a donc aucun degré d’adéquation à l’immédiat.

Dans le « travail scientifique » comme dans le couple, il y a tous ceux qui ont un idéal et qui déchantent rapidement car la réalité est toujours autre ; tous ceux qui appliquent (consciemment ou inconsciemment) les théories de leurs pères et qui souffrent ; tous ceux qui réitèrent toujours la même expérience, les mêmes calculs, en souffrant ; tous ceux qui savent qu’ils sont dans l’impasse et se tapent la tête contre le mur.
Et puis, il y a ceux qui embrassent toute la réalité, qui aiment sans attente de retour d’aucune sorte,  qui sont attentifs à eux-mêmes et aux autres, sans préjugés, qui découvrent à chaque instant le chemin qui surgit devant eux :  les inventeurs. Sommes-nous dans cette dernière attitude, toi dans ton labo et moi dans mon atelier?

L’action sociale juste ne naît pas en mettant en œuvre des réformes : elle naît dans l’éveil à ce qui n’est pas mesurable, c’est à dire la vérité (toujours nouvelle à la différence de la théorie).
La découverte de ce qui est juste est une explosion soudaine qui frappe l’esprit sans tenir compte du savoir.
La pensée fonctionne à partir d’un centre qui est le savoir accumulé (le moi). Elle ne peut explorer ce qu’elle ne peut comprendre. La révolution consiste donc à ce que chacun de nous libère son esprit de son propre conditionnement. Dans l’explosion de cette liberté créatrice, alors seulement, nous pourrons coopérer dans l’action.


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