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Blog d'Ivan Sigg

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Carnet quotidien d'un Artiste Peintre Romancier,performeur en peinture digitale animée, consultant en innovation et créativité


Le vieil homme prépare le Congrès hippique de Vincennes (Chapitre 37)

Publié par Ivan Sigg sur 14 Février 2016, 22:58pm

Catégories : #Dialogues, #philosophie

Le vieil homme prépare le Congrès hippique de Vincennes (Chapitre 37)

Moi : vous dites que vous revenez à pied de la Grande Bibliothèque ? C'est impressionnant ! Cela doit bien faire 3km aller-retour...
Vieil homme : ne vous méprenez pas. Le français que je parle devant vous n'est pas celui de la Bibliothèque François Mitterrand. C'est celui que j'ai appris à partir de 6 ans, à l'école primaire d'Aumale en Algérie. Il m'a donc fallu 100 ans pour maitriser une telle langue.
Moi : 94 ans exactement, Vous vous rajoutez 6 piges par coquetterie.
Vieil homme : ceux qui s'affirment le plus, emportent le morceau ! Va pour 94, si ça vous fait plaisir. À propos de chiffres, planifions ensemble, si vous le voulez bien, les dépenses du Congrès, qui hélas se déroulera un dimanche, jour catastrophique.
Moi : quel congrès ?
Vieil homme : allons ! Le Congrès du cheval, voyons ! Le fameux noir qui a inventé cette imitation du tiercé, a pointé son index sur mon ventre et m'a dit " vous savez docteur, un cheval de course coûte 3 millions, j'ai donc préféré un cheval de chasse à cour "
Moi : Souleymane, votre aide-soignant, est un homme prudent.
Vieil homme : ah ! Vous le connaissez !? C'est un turc formidable ! Un palfrenier noir, vous imaginez !? Après avoir longuement discuté avec lui j'ai pondu un plan à votre intention. Je m'allonge pour avoir toute ma tête et vous le narrer.
Moi : un plan de quoi ?
Vieil homme : mais le plan du Congrès hippique du cheval équestre !
Moi : ...!!!
Vieil homme : Premièrement : nous devons trouver une femme qui a le cheval dans la peau. Pour cela nous devons analyser le CHC, c'est à dire le Coût Humain du Cheval.
Moi : ha ha, c'est sans problème, pour vous qui avez écrit une thèse sur le Coût Humain du Travail.
Vieil homme : ah ! Vous êtes au courant ?... Deuxièmement : nous devons trouver trois vedettes, la troisième n'étant autre que vous, avec votre aisance naturelle et vos compétences multiples. Par ailleurs je ne me fais aucun soucis sur vos possibles capacités cavalières.
Moi : figurez vous que mon oncle était compétiteur et moniteur de cheval, aussi j'ai beaucoup pratiqué enfant.
Vieil homme : qu'est-ce que je disais ! Troisièmement : disposition du territoire de course, qualité du terrain et topographie argumentée par des photos aériennes.
Moi : je vois, c'est du sérieux.
Vieil homme : quatrièmement : le fanion ! C'est une pièce de toile de 3m sur 4m et une tradition militaire qui date du moyen-âge, véritable support de l'art local par ailleurs.
Moi : quelle est sa fonction ?
Vieil homme : le fanion est un objet de ralliement qui remplace le cheval. Cela nécessite donc des jumelles et des systèmes de visée complexes afin de suivre le fanion dans ses déplacements erratiques. Tout cela au frais de la collectivité bien sûr.
Moi : il va de soi.
Vieil homme : je vous sens dubitatif, un chouïa goguenard même... Peu importe. Les fanions étaient connus de Louis XIV. C'est à vous que j'ai pensé en premier car le fanion permet l'expression artistique des artistes nationaux.
Moi : c'est très sympathique de votre part.
Vieil homme : cinquièmement, car je dois avancer : la nourriture ! Tartare de cheval pour tous !
Moi : quoi !?
Vieil homme : mais non, je blague ! Je sais bien que vous êtes végétarien. On leur servira à tous du picotin afin qu'ils comprennent la dure condition des bourrins.
Moi : la pédagogie a de l'importance pour vous.
Vieil homme : sixièmement : l'habillement !
Moi : poste de grande importance car l'habit ne fait pas le moine.
Vieil homme : ne prenez pas ça à la légère ! C'est une question à aborder avec un esprit snob. La chapka russe sera obligatoire pour tous car il fait froid et humide en Normandie. Tailleur cuir moulant cravache, pour les femmes, et costume six pièces tout cuir pour homme.
Moi : je suis impressionné. Il n'y aurait pas comme une légère connotation SM ?
Vieil homme : nos vedettes vont se dépenser sans compter, d'autant plus que c'est gratuit. Il y aura des loges pour les humains et des sous-sols privés pour recevoir les chevaux.
Moi : comment dois-je intervenir là-dedans ?
Vieil homme : personne ne vous a demandé votre avis, mais vue votre expertise, vous vous imposez comme l'Artiste avec un grand A. C'est vous qui peindrez le fanion et qui le porterez. Il a une importance majeure dans notre affaire, cependant c'est beaucoup moins cher qu'un cheval. "C'est le fric qui fait tourner tout ça" m'a dit un confrère. Certes il faut de l'argent pour s'acheter un costume de soirée avec bottes et Cravate. Et surtout, pensez à établir un contrat, ne vous laissez pas enfariner comme au TNP de Villeurbanne. Je vous laisse le soin de broder là-dessus.
Moi : je vois que vous brodez très bien sans moi.
Vieil homme : il faut savoir prendre les idées là où elles gisent, en particulier la trouvaille du fanion qui est un apport remarquable dont je ne suis pas peu fier.
Moi : ce Congrès du cheval sénégalo-turco-normand, m'a l'air pensé dans ses moindres détails !
Vieil homme : la grande question qui me taraude le cortex, c'est de savoir ce que l'on doit dévoiler du passé des organisateurs ?
Moi : ah ! Vous voulez parler de vos états de service en tant que médecin des prisons et médecin des taxis ?
Vieil homme : non je parlais de Souleyman qui monte et joue tous les dimanches... Ah ! l'organisation de ce PMU normand sera intitulée "Vincennes".
Moi : étonnant !
Vieil homme : tout cela est balbutiant, soit dit en passant, surtout dans ma tête.
Moi : mais il dérape complètement ! Et je me laisse entrainer avec lui dans ses carambolages sémantiques et ses tonneaux cognitifs...
Vieil homme : personne n'est au courant, mais les cavalières vont avoir de bons salaires. Bien qu'elles aient la jambe ferme et superbement galbée, en général elles vivotent dans des haras de seconde zône, aux manèges désuets et aux carrières toutes en ornières. Souleyman, l'organisateur turco-normand était ignare en arrivant sur le projet, mais il avait une intelligence brute qui ne demandait qu'à s'éveiller. C'est aujourd'hui un bel homme prévenant, qui m'apporte tous les jours un goûter, à 16h30 précises.
Moi : vous êtes intarissable aujourd'hui !
Vieil homme : le plus excitant, c'est la décoration des fanions. Je connais l'ampleur de la tâche qui vous incombe.
Moi : vous m'accordez une immense confiance...
Vieil homme : attention ! Sous couvert de sport, derrière l'hippique il y a le fric car ce qui compte le plus c'est l'impulsion économique que cette aventure équestre va donner au pays. Le canasson est bien plus moteur que le Hollande, économiquement parlant.
Moi : cette entreprise est osée, elle a même un niveau politique que je n'entrevoyais pas.
Vieil homme : dès qu'il y a du fric à un échelon très élevé, ça devient politique. Ça doit chercher dans les...plusieurs millions.
Moi : mais qu'est-ce qu'il dégoise aujourd'hui. Je n'en peux plus. Il faut que je l'interrompe et que je rentre faire une sieste. Je vais le mettre devant une émission de télé...
Vieil homme : j'attends de vous que vous vous occupiez de tout. C'est une idée très riche je crois. Et puis quelle coïncidence que tout ce monde coexiste sur un si petit territoire. Des algérois, des polonais, des turcs... Certes le territoire est petit, mais en réunissant les histoires de chacun, dont je constitue le maillon principal ou la clé de voute, cela couvre un siècle. Je sais, vous allez ajouter "94 ans exactement" ha ha ha.
Moi : comme vous dites.
Vieil homme : laissez tomber la télé. Si ma femme a préparé un repas simple il serait peut-être bon d'y aller sans attendre d'avantage. Et puis quand nous serons en bas, vous me transmettrez le code de la grille qui donne sur la rue, je vous prie, afin que je puisse rentrer chez moi.

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